Une manifestation sans écarts ?
Hier, pour la première fois depuis 14 ans, l’ensemble des forces de police a défilé lors d’une manifestation pour exprimer leur manque de soutien de la part du gouvernement et de la justice. A cette occasion, nous aurons droit une nouvelle fois à la traditionnelle guerre des chiffres mais si cette fois le légendaire écart entre les chiffres des syndicats et ceux de la police devrait être nul.
En revanche, il est intéressant de voir que des méthodes de comptage de plus en plus perfectionnées se développent.
Le comptage traditionnel
Le comptable traditionnel est un ensemble de méthodes qui, à l’aide d’extrapolations, permettent d’estimer le nombre total de manifestants. La première consiste à se poster sans bouger à un point fixe, le long du cortège ou en hauteur, et de compter le nombre de rangs de manifestants à passer devant le compteur. En connaissant le nombre moyen de personnes par rang, on arrive à donner un résultat assez proche de la réalité. C’est cette méthode qui est généralement utilisée par les forces de l’ordre.
Quant aux organisateurs, syndicalistes ou non, ils semblent privilégier des méthodes de comptage de groupes. A partir d’une estimation fixe de la densité de participants au mètre carré et en fonction de la longueur du cortège, on retrouve un chiffre qui peut se révéler loin de la réalité. En effet, on part d’une donnée théorique qui peut grandement fluctuer entre les manifestations.
Au final, on se retrouve avec des chiffres aberrants, totalement éloignés de la réalité et personne ne sait vraiment combien de personnes ont défilés pour la cause. C’est à ce moment là qu’interviennent des moyens plus perfectionnés.
La manifestation au crible algorithmique
Une société espagnole, Lynce-ExactCrowd, édite un logiciel qui se base sur une reconnaissance des visages et les images de la manifestation. Celles-ci sont traitées par un algorithme pour déterminer le nombre exact de participants. Elle a été utilisée en France en 2010 lors du défilé contre la réforme des retraites par France Soir. La manifestation ciblée aurait réuni 330 000 personnes selon les syndicats et 89 000 selon la police.
Le résultat de Lynce-ExactCrowd est implacable : 73 027 participants avec une marge d’erreur de 10% soit au mieux un peu plus de 80 000 manifestants, soit moins du quart du chiffre annoncé par les syndicats. Comparativement, les forces de l’ordre s’en tirent un peu mieux.
Ces résultats font se poser de sérieuses questions sur les chiffres relayés par les grands médias à chaque manifestation. Ne vaudrait-il pas mieux avoir un chiffrage clair et précis plutôt que deux résultats fantaisistes que personne ne prend au sérieux ?
Même si le comptage des manifestants devait être plus archaïque hier, restons à l’écoute, à l’heure des bilans, pour vérifier qu’il n’y aura pas eu d’écarts, autant sur l’aspect mathématique que sur celui des débordements.